À LA BIENHEUREUSE VIERGE MARIE
D’un sermon de saint Bernard, abbé de Clairvaux
(Super « Missus est » II,17; PL CLXXXIII,70-71)
Regarde l’étoile, invoque Marie
« Et le nom de la Vierge était Marie ». Disons aussi quelques mots sur ce nom qu’on dit signifier étoile de la mer, et qui convient si bien à la Vierge Mère. Elle est en effet comparée avec beaucoup d’à-propos à une étoile. Tout comme l’astre émet son rayon sans diminution, ainsi la Vierge met son Fils au monde sans altération. Ni le rayon n’amoindrit l’éclat de l’astre, ni le Fils l’intégrité de la Vierge. Oui, c’est elle, cette « noble étoile issue de Jacob » dont le rayon éclaire le monde entier, dont la splendeur éclate jusque dans les cieux, pénètre les enfers, se répand jusque sur la terre, réchauffe les âmes plutôt que les corps, fait éclore les vertus, brûle les vices. Oui, c’est elle, cette étoile brillante et magnifique que rien n’empêche de s’élever au-dessus de « cette mer vaste et immense », étincelante de mérites, éclairante en ses exemples.
O qui que tu sois qui te vois, dans les fluctuations de ce monde, ballotté au milieu des bourrasques et des tempêtes plutôt que marcher sur la terre ferme, ne détourne pas les yeux de l’éclat de cet astre si tu ne veux pas être submergé par les flots. Si se lèvent les vents des tentations, si tu cours aux écueils des épreuves, regarde l’étoile, appelle Marie. Si tu es secoué par les vagues de l’orgueil, ou de l’ambition, ou de la détraction, ou de la jalousie, regarde l’étoile, appelle Marie. Si la colère, ou l’avarice, ou les attraits de la chair ébranlent la nacelle de ton âme, regarde vers Marie. Si, troublé par l’énormité de tes fautes, accablé par la souillure de ta conscience, épouvanté par l’horreur du jugement, tu commences à sombrer dans le gouffre de la tristesse, dans l’abîme du désespoir, pense à Marie. Dans les dangers, les angoisses, les doutes, pense à Marie, invoque Marie. Qu’elle ne quitte pas ta bouche, qu’elle ne quitte pas ton cœur.
Et pour obtenir le secours de ses prières, ne t’écarte pas de l’exemple de sa vie. En la suivant, impossible de t’égarer; en la priant, de te décourager; en pensant à elle, d’errer. Ta main dans la sienne, pas de chute ; sous sa protection, pas de crainte ; sous sa conduite, pas de fatigue ; avec son appui, tu touches au but. Et ainsi en toi-même tu expérimenteras comme est juste cette parole : « Et le nom de la Vierge était Marie. »
Le Salve cistercienne dans un antiphonaire du XIIIe siècle conservé à Poblet. Deux aspects du texte primitif de cette antienne mariale, qui faisait partie de l’Office divin avant de devenir un chant indépendant à la Vierge Marie : « Salve regina misericordiæ », et à la fin, « o dulcis Mariæ » : les mots « Mère » et « Vierge » sont omis. Les moines de Poblet chantent le Salve regina chaque jour, après Complies, dans l’obscurité, avec seulement trois cierges allumées sur l’autel.
SALVE, REGINA,
Mater misericordiæ:
vita, dulcedo,
et spes nostra, salve.
Ad te clamamus, exsules, filii Evæ;
ad te suspiramus,
gementes et flentes
in hac lacrimarum valle.
Eia, ergo, advocata nostra,
illos tuos misericordes oculos
ad nos converte;
et Iesum, benedictum
fructum ventris tui,
nobis post hoc exsilium ostende.
O clemens, o pia,
o dulcis Virgo Maria!
SALUT, Ô REINE,
Mère de miséricorde,
notre vie, notre douceur,
notre espérance, salut !
Nous crions vers toi,
enfants d’Ève exilés.
Vers toi, nous soupirons,
gémissant et pleurant
dans cette vallée de larmes.
Ô toi, notre avocate,
tourne vers nous
ton regard miséricordieux.
Et, après cet exil, montre-nous Jésus,
le fruit béni de tes entrailles.
Ô clémente , ô pieuse ,
ô douce Vierge Marie !